À Ploufragan, ces scientifiques dirigent des recherches sur la COVID-19
Gilles Salvat et Nicolas Eterradossi
Mise à jour le
En quoi l’Anses est-elle compétente en matière de recherche sur la Covid-19 ?
Gilles Salvat : Dans ses trois laboratoires, l’Anses étudie des coronavirus qu’on retrouve chez les cochons et les volailles (Ploufragan), les carnivores domestiques (Maisons-Alfort) et la faune sauvage, dont les chauves-souris (Nancy). Nous ne sommes pas des spécialistes de la Covid-19, mais nous connaissons bien des coronavirus assez proches de celui qui affecte le monde en ce moment. Ces connaissances peuvent contribuer à la recherche sur la Covid-19.
À quel moment le laboratoire de l’Anses de Ploufragan a-t-il été sollicité ?
G.S. : Dès début mars, les ministères de l’Agriculture et de la Santé nous ont sollicités afin que nous émettions un avis sur les risques de contamination via l’alimentation et via les animaux domestiques. En avril, nous avons été consultés sur les risques éventuels liés aux boues d’épandage. Des particules virales du SARS-CoV-2 avaient, en effet, été détectées dans les selles de certains patients. Nous
avons aussi donné des conseils pour éviter les toxi-infections alimentaires durant le confinement. Et plus récemment, nous
avons travaillé sur la décontamination des masques. Enfi n, en tant que représentants invités au Haut Conseil de santé publique, nous avons contribué aux avis sur les conditions de reprise de l’école, sur l’intérêt des masques en extérieur et en intérieur, sur la désinfection des rues…
Nicolas Eterradossi : Ajoutons que notre laboratoire de Ploufragan est en mesure de réaliser certaines étapes du diagnostic de la Covid-19. Notre personnel a été formé et nous nous tenons à disposition, depuis fi n mai, pour renforcer si nécessaire les capacités du centre hospitalier ou de Labocea (Ploufragan), fortement mobilisés en ce moment.
Ces avis ont-ils donné lieu à des recherches en laboratoire ?
N.E. : L’Anses travaille depuis des années sur les coronavirus et veille à publier les résultats de ses travaux. Il existe toute une bibliographie en la matière. Lorsqu’un avis est préparé, les experts font d’abord le bilan des données fi ables existantes. S’il manque des éléments, un programme de recherche peut être lancé auprès des laboratoires compétents. La communauté des chercheurs est très bien structurée et on se répartit le travail en fonction des compétences spécifi ques. Il y a eu un effort sans précédent de fi nancement de
la recherche sur le sujet de la Covid-19 depuis le début de l’année.
G.S. : Depuis janvier, 48 000 articles scientifiques sur les coronavirus ont été publiés !
Le laboratoire de Ploufragan a-t-il directement participé à des recherches ?
N.E. : Plusieurs programmes de recherches étudient l’évolution des coronavirus animaux et les conditions leur permettant
d’infecter différentes espèces animales.
Nos chercheurs ont aussi été mobilisés plus concrètement pour valider différents procédés de décontamination qui seraient
applicables aux masques à usage unique pour faire face à une éventuelle pénurie. Ce travail a conduit à participer à un dépôt de brevet et à une publication internationale.
Le laboratoire de l’Anses, à Ploufragan, est peu connu du grand public. Pourtant ses compétences sont essentielles.
N.E. : L’organisation de la recherche impose des collaborations aussi larges que possible aux niveaux national et international. Mais le laboratoire bénéficie aussi de l’écosystème scientifi que de la Technopole de Saint-Brieuc Armor qui nous permet d’interagir étroitement avec de nombreux acteurs locaux : Labocea, Zoopole Développement, l’Institut Carnot AgriFood Transition… Et localement, nous ne sommes pas les seuls à être mobilisés dans la réponse d’urgence à la Covid-19. Le centre hospitalier, les laboratoires d’analyses, Labocéa, les médecins généralistes… sont largement aussi impliqués et plus sollicités que nous.